J’ai récemment eu la chance de partager une belle et grande tablée, avec entre autres, Stéphane Bureaux. Nous étions sur le banc des enfants et ce fut un plaisir de rencontrer et de pouvoir échanger avec une personnalité que je suis depuis mes années d’études, à travers des livres et des conférences, comme une référence inspirante du design.
Stéphane Bureau soutien l’hypothèse que « le design, c’est comme la foi : tu l‘as ou tu l‘as pas » !
Avec un cynisme certain – en tant que prof – il explique qu’il serait presque inutile d’enseigner cette discipline : soit on la comprend et on la vit de façon quasi-innée, soit on peut toujours essayer d’en faire de grandes démonstrations, si la personne en face n’est pas habitée (par cette foi), on se heurte à des murs.
Je me croyais athée de toute religion.
Mais suite à cet échange, j’ai admis que je suis, en fait, croyante… voire même pratiquante !
Je pense effectivement faire partie de ces personnes qui le ressentent à travers des textes, des références, des symboles. Le design habite ma vie, et je suis intimement convaincue sans que l’on ait à m’en faire la démonstration, que les objets, s’ils sont bien pensés, sont là pour nous rendre l’existence plus belle et plus facile. Je témoigne de mes expériences personnelles à travers cet espace où j’ai l’espoir de communiquer sur le rôle intelligent que peuvent prendre les choses. Ou même encore, de les dresser sur des autels !
Mais peut être est-ce plus une question de culture, que de religion, étant tombée dans la soupe depuis mon plus jeune âge ?
« C’est déco ». « C’est design. »
Ces mots en vogue sont trop souvent amalgamés et le sens du design est devenu, à tort, un adjectif qualifiant un style aux formes simples et d’une apparence épurée, ou originale. Les frontières ne sont pas étanches. Que ce soit dans le cas du design ou des arts décoratifs, il s’agit bien d’un art certain, mais qui reste toujours appliqué à un usage. Je joue très souvent avec cette porosité, ne prenant pas seulement comme exemple à mes démonstrations des objets qui ne répondent qu’à la seule définition du design industriel. Je fais aussi la part belle à l’artisanat, qui peut lui aussi présenter des objets bien conçus. J’aime alors aussi parler d’une certaine intelligence de la main.
Autrement dit, le design représente pour moi un savoir-faire et il s’inscrit avant tout dans un savoir être assez exigeant pour n’accepter que ce qui est beau et bon pour nous.
Ce constat qui est l’origine de ce blog était repris ce matin dans l’interview des Frères Bouroullec sur France Inter, que je vous invite à réécouter en suivant ce lien.
Le design existe depuis la préhistoire. Tout ce qui n’était pas préexistant, qui n’a pas poussé naturellement, tout ce qui est un objet pensé est une question de design ou de projet. Tout objet fabriqué nécessite de la pensée, en relation avec une économie et une production. Le design est partout, il est tout le temps présent, dans les objets du quotidien, produits en plus ou moins grande quantité. Il dépend simplement de l’intérêt et du champ qu’on lui donne. La frénésie d’achats a changé la nature des objets. Les choses deviennent de plus en plus fabriquées, de façon légère, moins permanente, et sont de moins en moins adaptées à la nature des objets.
En conclusion, je dirai donc qu’au delà de la question de la foi, ce en quoi il faut avoir l’intime conviction est que l’environnement, la qualité esthétique, mais surtout l’harmonie sont importants, voire indispensables.
Mais a-t-il une seule vision possible du design, ou pouvons nous être moins puristes, ou polythéistes ?
Est-ce une vaine croisade que d’essayer de faire de la pédagogie sur le design pour essayer d’en montrer la portée à tout le monde ?
Je serai curieuse de connaître vos avis sur la question, vous qui me lisez. N’hésitez pas à me confier vos impressions dans les commentaires.
Images :
Bénitier de l’église jésuite d’Heidelberg © Photo Marion Chatel-Chaix
Bénitier de l’église jésuite d’Heidelberg © Photo Marion Chatel-Chaix